L’écrevisse rouge de Louisiane

Boris Presseq, botaniste nous fait partager ses connaissances sur la faune et la flore présentes sur les voies d’eau.

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Vous avez dû tous remarquer au début de l’été la présence sous les berges, sur les coques et dans la végétation aquatique d’une très belle écrevisse rouge. Il s’agit de l’Ecrevisse de Louisiane (Procambarus clarkii). C’est une écrevisse d’introduction récente puisque les premières importations ont eu lieu en Espagne en 1973 pour l’astaciculture. De là, elle a été introduite dans les étangs du Sud de la France et en Italie. Comme elle apprécie les eaux chaudes (10°C minimum pour son développement embryonnaire), elle reste cantonnée pour l’instant dans le Sud de l’Europe. Sa taille maximale est d’une douzaine de cm. Les femelles sont plus petites que les mâles avec des pinces également plus petites et les juvéniles ont une couleur plutôt vert kaki. Chaque femelle peut pondre jusqu’à 600 oeufs. Le développement est extrêmement rapide pour une écrevisse puisque la maturité sexuelle est effective au bout de 5-6 mois, du coup il peut y avoir deux générations par an si l’hiver est doux. La durée maximale de vie est de 4 ans mais les adultes dépassent rarement 18 mois en milieu naturel. C’est une écrevisse fouisseuse, chaque individu se creuse un terrier ou bien se réfugie dans une anfractuosité. Elle est extrêmement tolérante aux variations de température, de quantité d’oxygène dissous (elle peut même venir respirer en surface), de niveau d’eau et de pollution. Si le milieu vient à manquer d’eau elle se réfugie tout au fond de son terrier ou bien sort de l’eau la nuit, sur la terre ferme à la recherche d’un autre plan d’eau et peut parcourir plusieurs centaines de mètres. C’est une espèce omnivore qui consomme des animaux vivants ou morts et des végétaux. Le cannibalisme est fréquent. Dans le Canal du Midi, elle sert de nourriture au Brochet, au Black bass, à la Perche et au Sandre ainsi qu’aux hérons. Très agressive et territoriale on voit souvent des individus à qui il manque une pince, résultat de combats fréquents. Cette pince repoussera petit à petit lors des mues de l’écrevisse. Les mues se font durant toute sa vie, elles rythment sa croissance comme celle de tous les arthropodes. Cette espèce est largement sujette à la “peste de l’écrevisse”, une maladie transmise par un champignon qui entraîne la mort de l’individu infesté en quelques semaines. Dans le Canal du Midi qui est un milieu artificiel, entretenu trop régulièrement pour pouvoir revenir à un fonctionnement sauvage plus naturel, il serait complètement illusoire de vouloir éliminer cette espèce au vu de la dynamique de ses populations. La lutte qui se fait dans d’autres régions se fait souvent avec des produits phytosanitaires qui font plus de dégâts sur le milieu que sur l’écrevisse elle-même. Aujourd’hui bien répandue dans tout le sud-ouest on peut juste se contenter de ne pas l’introduire dans les plans et cours d’eaux où elle n’est pas encore présente. Sa pêche (qui nécessite quand même le permis) est assez facile et ludique et l’espèce étant classée comme espèce nuisible et invasive, elle est autorisée toute l’année. C’est une très bonne écrevisse de consommation, abondamment prélevée et consommée dans ses régions d’origine aux USA sous le nom de Louisiana crayfish. Difficile de dire si dans le Canal du Midi elle a éliminé des espèces indigènes. A chaque fois que j’en entends parler c’est pour répandre cette fausse rumeur. Or je n’ai rien trouvé en bibliographie qui montre que l’on ait péché des écrevisses dans le Canal, ni sur la présence d’une espèce indigène.

Dans le sud-ouest on peut trouver 2 espèces indigènes mais qui s’adaptent beaucoup moins à nos activités et à nos pollutions que l’Ecrevisse de Louisiane et qui ont en plus des écologies très particulières.

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L’Ecrevisse à pattes blanches (Austropotamobius pallipes) que l’on pourrait trouver dans le Canal du Midi qui est assez tolérante aux conditions de température et d’oxygénation variables de l’eau mais n’est pas tolérante aux pollutions organiques (bétail par exemple) et aux pollutions aux pesticides.

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L’Ecrevisse à pieds rouges (Astacus astacus) demande des eaux très oxygénées et donc ne pourrait vivre dans les eaux chaudes estivales du Canal.

Dans le Canal on peut par contre rencontrer deux autres espèces d’écrevisses exotiques.

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L’Ecrevisse à pattes grêles ou Ecrevisse Turque (Astacus leptodactylus) est d’introduction récente (années 1970) et supporte des conditions de vie très variables. C’est une grande écrevisse (15cm) grise avec de longues pinces massives et allongées.

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L’Ecrevisse américaine (Orconectes limosus), de couleur vert-marron, 12cm maximum avec de petites pinces, peu proéminentes du reste du corps. Sur l’abdomen des traits rouges permettent de l’identifier facilement.

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Dans les années qui viennent, on pourrait même voir apparaître la très belle Ecrevisse bleue (Cherax destructor) une écrevisse australienne introduite dans les années 80 dans le nord de l’Espagne et depuis naturalisée en Aragon et en Navarre dans certains cours d’eaux aux températures élevées.

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